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Histoire de la construction du pont de Saint-Astier

Seule représentation du pont dans son état d'origine, avec une rambarde en pierre. Ce n'est qu'à la fin du siècle que le pont fut élargi par des trottoirs et des rambardes en métal
Source : "Annales agricoles"
Vue de Saint-Astier, dessin et lithographie par Eugène Arvengas, impr. Dupont Périgueux, extrait des Annales agricoles et littéraires de la Dordogne, 1840
(coll. SHAP).

Il y eut des ponts en bois à Saint-Astier dès le 13ème siècle (1). Mais ceux-ci n’étaient ni solides, ni durables et vite emportés par une crue. En 1830 il existait encore des traces d’un ancien pont dont nous ne savons rien. D’ailleurs la rue qui descendait vers la rivière et qui s’appelle maintenant rue du Commandant Boisseuilh (2) s’appelait rue de l’ancien pont.
Aussi il fallait un pont en pierre comme il en existait à Périgueux ou Bergerac
Les chanoines, comparables à des seigneurs du lieu, en avaient, semble-t-il, la volonté avant la révolution mais ne l’ont pas fait. Donc seul un bac payant permettait de traverser avec paiement et en subissant les aléas de la météo.
Jean-Baptiste Fauchier de Valbrune, maire de 1816 à 1823 (3), a cherché une solution pour construire ce pont. Mais la commune n’avait pas les finances pour le faire. Il fait établir des devis qui se montent à 120 000F.
En 1824 monsieur Paul Dupont (propriétaire du château de Puyferrat), avec des associés non identifiés, propose au ministre de l’intérieur de réaliser un pont à leurs frais mais en instaurant à leur bénéfice un péage pendant 50 ans. Cela n’a pas de suite.
En 1828 lors du banquet qui fête le retour du canton à Saint-Astier au lieu de Grignols, il est rappelé, par M. de Valbrune, le souhait de cette construction.
Un ingénieur aspirant des Ponts et Chaussées, M. Jegou, développe le projet. L’ingénieur en chef Thénard demande que le pont soit surélevé de 70 cm et les travées élargies de 2m pour prévenir les crues. Ce qui sera fait. A noter qu’à l’époque il est fait allusion au risque lié à la débâcle de glace sur la rivière à cause des hivers où les rivières sont gelées.
M. JBF de Valbrune demande, en 1829, l’autorisation au préfet puis organise avec d’autres une souscription afin de financer entièrement le pont sans péage. Les souscripteurs sont nombreux et participent plus ou moins suivant leurs moyens. Mais à ce jour nous n’en avons pas la liste précise. Des souscripteurs sont aussi de villes plus éloignées et ce sont Mrs de Valbrune et Dauriac qui se chargent d’aller les chercher. A noter que 2 communes, Léguillac de l’Auche et Razac votent un impôt supplémentaire pour participer à cette souscription. La souscription rapporte 56 000F alors que le devis disponible est de 75 000F.
Le préfet donne l’autorisation de construire ce pont le 31 août 1830.
L’ingénieur M. Jegou intervient à nouveau. Il rédige le 11 mars 1831 le cahier des charges puis le devis qu’il ramène, sans les accès de chaque côté, à 55 000F.
Le 31 mars 1831 M. JBF de Valbrune (de Labatut), Etienne Boé (de Ribérac), Bertrand Doche, jeune, de Font Peyrière à Saint-Astier se réunissent avec M. Jean Leymarie dans son auberge de Montanceix pour rédiger un engagement (4) de lancer les travaux qui doivent être livrés pour le 22 octobre 1832. Ils se portent caution sur leurs biens propres du paiement de l’entrepreneur.
Les travaux commencent le 24 juin 1831 (jour de la fête de M. de Valbrune). La première pierre est posée en juillet par le préfet qui promet de solliciter une subvention du conseil général de 15000F. La révolution de 1830 (5) (les 3 glorieuses qui voient un roi des français succéder à un roi de France) provoque un changement de préfet et la perte de la subvention.
M. de Valbrune fit un emprunt personnel de 6 000F afin de faciliter les paiements.
Le bilan financier fut positif car à force de serrer le budget, il advint un bénéfice de 12 000F à partager en 4. M. de Valbrune utilisa sa part, qu’il doubla, pour payer l’accès côté rive gauche donc vers Montrem ou les quatre routes.
Les travaux se terminent dans les temps pour une inauguration le 12 octobre 1832 (6).
Pour le remercier la commune lui offrit un terrain de 5 ares (valant 180F) enclavé derrière sa propriété. Elle déclara : « les messieurs du conseil prient M. de Valbrune d’être bien persuadé qu’ils saisiraient avec empressement et satisfaction toutes les nouvelles occasions qui pourraient se présenter de lui témoigner que tous ses bienfaits sont profondément gravés dans leur souvenir »
M. JBF de Valbrune est décédé en 1848.
Le pont fut élargi à la fin du 19ème siècle pour y ajouter des trottoirs et remplacer la rambarde en pierre par des grilles métalliques. Le dessin joint à ce texte est la seule représentation du pont dans son état initial.
Sources :
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De nombreux manuscrits aux AD24 39 S 3
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Notes historiques de JB de Valbrune (neveu de JBF de Valbrune) publiées en 1852 et citées dans le livre de A.J. et S. Avrilleau Saint-Astier, mille ans d’histoire, pages 423 à 431
1 - Bulletin de la SHAP 2015 p96
2 - Rue qui va de part et d’autre du pont actuel. Erreur d’orthographe sur le nom de Antoine Boisseuil né le 4.11.1865 mort pour la France le 7septembre 1914 dans la Marne chef d’escadron au 21e régiment d’artillerie.
3 - Jusqu’en 1884 les maires sont nommés par le préfet. Il démissionne pour s’occuper de sa femme malade.
4 - Voir document
5 - https://fr.wikipedia.org/wiki/Trois_Glorieuses
6 - M. JB de Valbrune écrit dans ses notes historiques : « …le 12 octobre le public put enfin jouir du nouveau pont que dans sa joie et dans son enthousiasme il voulait décorer du nom de l’entrepreneur principal, qui, trop modeste pour le souffrir, s’y opposa. »


source: "AD 24 39 S 3"

